lundi 5 septembre 2016

Retour sur notre expérience au Forum social mondial : la culture et le mouvement Transition


La culture et le mouvement Transition au Forum social mondial





En tant que montréalais actif au sein des initiatives locales de transition, la tenue du Forum social mondial (FSM) dans notre ville la semaine dernière - (première rencontre tenue dans l’hémisphère nord) - fut l’occasion idéale de discuter de la culture de transition avec des praticiens, chercheurs et adeptes du Québec, du Canada et d’ailleurs au monde, et ce, sans devoir voyager :). 


En mars dernier, une rencontre de remue-méninges s’est tenue portant sur le genre d’activité pouvant être organisée à l’occasion du FSM. Autour de la table se trouvaient des représentants de divers projets, organismes et initiatives de transition, dont Villeray en Transition et Transition NDG [les deux principaux organismes de quartier du mouvement Transition montréalais], Loco [la nouvelle épicerie écologique zéro déchet de Montréal et la première en son genre au Québec], L’Accorderie [le réseau principal du Québec en matière d’échanges de services], Jardins sans frontières [une entreprise sociale de permaculture] ainsi que la Coalition Climat Montréal [organisme travaillant avec les élus municipaux afin de concevoir et de mettre en œuvre un plan de « descente énergétique » pour la Ville]. Effectivement, c’était un mélange de gens porteurs d’une certaine expérience et d’un savoir-faire intéressant sur la pratique de la transition écologique. Ils désiraient capitaliser sur la tenue du FSM dans leur ville pour tenter de consolider un réseau de Villes en transition au Québec.



    Première rencontre en mars

Au fil de plusieurs rencontres s’est dégagé le projet d’une activité bâtie sur les trois piliers de la culture de la transition : « L’esprit, le Cœur et les Mains »


      Le programme et la structure de l’activité

L’équipe ne se doutait pas que le jour de l’événement elle accueillerait plus de quarante participants, dont une personne qui venait d’aussi loin que de l’Antarctique ! 

On commença la rencontre avec le chapitre « Esprit de la transition », incluant une mise en contexte du mouvement des Villes en transition en rapport avec les deux discours dominants en études des transitions, soit les approches managérial-technocentric et eco-centric radicale[1]. Ce chapitre présentait aussi les recherches universitaires dont font l’objet les Villes en Transition canadiennes, notamment le travail important du professeur Blake Poland de l’Université de Toronto, dont l’équipe a étudié le mouvement au Canada sur une période de trois ans[9]. Finalement, le concept de la résilience communautaire fut présenté aux participants par la technique de discussion « bocal à poisson », en utilisant l’expérience pratique de Transition Guelph et de Sherbrooke en Transition, deux initiatives canadiennes. 


    Au cours de la partie « Esprit » de l’activité

De « l’esprit », on passa ensuite au deuxième pilier de la culture de transition, « le coeur ». Se basant sur son propre parcours et son expérience pratique, l’équipe de Transition NDG a créé des interventions sur la déontologie, la pratique de la communication non violente ainsi qu’un exercice de visualisation.

On a ensuite fait place au troisième pilier, «  les mains  ». Loco, Transition NDG et Villeray en Transition ont présenté leurs projets de quartier, dont Incroyables comestibles et La Remise [une bibliothèque communautaire de partage d’outils et de savoir-faire] pour n’en nommer que deux.

En général, et malgré le peu de temps et de ressources qu’ont eu les organisateurs pour préparer l’activité, le niveau de participation et la qualité des échanges ont dépassé toutes nos attentes !

Voici une petite liste des faits saillants que j’ai retenus des échanges et discussions qui ont été partagés :

· L’importance pour la pratique de la transition de prendre en compte les divers discours sur la transition et leurs articulations théoriques respectives.

· Le besoin de mieux identifier et de mieux comprendre les aspects déterminants du système dominant (on a parlé de violence, de vulnérabilité, et d’exclusion raciale au sein même du mouvement de transition) ainsi que les occasions d’agir qui se présentent alors que le mouvement étend sa sphère d’influence sur la politique municipale [plus particulièrement à Montréal]. Ainsi, il importe d’identifier les éléments politiques avec lesquels le mouvement doit tisser et nourrir des liens [s’il en est].

· Le besoin pour le mouvement d’aborder de façon concrète son problème d’exclusion sociale, c’est-à-dire son manque d’hétérogénéité démographique. Une piste intéressante à cet effet serait de parler non seulement de résilience mais surtout aussi de vulnérabilité afin de mieux comprendre les liens entre ces deux facettes, leur dynamique ainsi que leurs constructions sociales.

· Le besoin pour le mouvement de considérer comment il se comportera devant la violence et la marginalisation exercées par le système dominant sur les citoyens et communautés les plus vulnérables et qui sont au premier rang des luttes sociales et environnementales. En ce sens, une stratégie de transition plus ouverte pourrait être requise [militantisme direct, engagement politique et pratiques quotidiennes inhérentes à la culture de transition].

· Les travaux et expériences de Villeray en Transition et de Transition NDG doivent être partagés avec d’autres individus et groupes montréalais [et d’ailleurs] désirant amorcer des initiatives citoyennes de transition dans leurs quartiers [MileX, St-Henri, Rosemont].

· L’utilité d’une croissance du mouvement dans les arrondissements montréalais, qui renforcerait la vision populaire citadine sur laquelle s’appuie le mouvement pour une ville carboneutre, et nourrirait à la base le plan de décarbonisation (descente énergétique) sur lequel travaille la Coalition Climat Montréal.

· L’existence d’une occasion évidente de faire profiter les contacts de réseautage réalisés au cours et à la suite de l’activité pour mieux catalyser le réseau Québec en transition.

· Finalement, mais de toute aussi grande importance, il semble y avoir une demande et un besoin de développer la structure « Esprit, Cœur, Mains » pour tenir d’éventuelles activités, ateliers, conférences et peut-être une formation holistique ?


À mon sens, il y a de quoi être fier de la façon dont les acteurs du mouvement local ont saisi l’occasion inspirante fournie par le Forum social mondial lors de son passage à Montréal !



    Réseautage

Un gros merci à tous ceux qui se sont impliqués. Avec beaucoup d’enthousiasme j’espère que cet événement sera le précurseur de plusieurs nouvelles collaborations et qu’il représente le début d’une belle aventure qui nous permettra de diffuser, de renforcer et de bâtir ensemble le mouvement de la transition à Montréal, au Québec et au Canada.


    Le comité organisateur, de gauche à droite : Kathryn, Jane, Maureen, Dany, Martine, Gorana,        Joey et Émanuèle


Par: 
Joey El-Khoury
Candidat au doctorat, Université de Montréal
Professeur, HEC Montréal / McGill University
Cofondateur, Jardins sans frontières
Membre du comité de coordination, Coalition Climat Montréal





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[1] Audet, René (2013)